Grenoble et ses alentours sont un véritable catalyseur d’innovation. Depuis 150 ans, cette région mise sur un triptyque efficace : industrie, recherche et formation. Le territoire figure parmi les leaders mondiaux dans le domaine des technologies de santé. Pour cette 9e étape, zoom sur cinq structures emblématiques : Medicalps, Agir’ à dom, Office Santé, Clinatec et Medevice.
Medicalps : Grenoble, un laboratoire vivant de l’innovation en santé
Pour notre première halte en Sud Rhône Alpes, nous nous rendons à La Tronche, au cœur de la pépinière Biopolis, structure de l’université Grenoble Alpes. À une vingtaine de minutes de Grenoble, notre van se gare devant le bâtiment de Medytec. Il s’agit du lieu totem de Medicalps. Un espace dédié à la collaboration et à la réflexion pour les entreprises et les chercheurs, leur permettant de partager des compétences et de faire émerger des solutions innovantes. Ce centre d’échange incarne l’ambition de faire rayonner les forces du territoire en santé et technologies médicales.
Medicalps accompagne ses membres dans différents domaines tout en facilitant le passage à l’échelle des projets innovants. La présence de dispositifs médicaux avancés, de prothèses intelligentes et de jumeaux numériques témoigne du potentiel de ces coopérations. Mais beaucoup de start-up se heurtent à la difficulté de transformer un prototype prometteur en une solution industrialisable, capable de répondre à une demande de grande ampleur. Le cluster soutient ces entreprises en facilitant leur accès aux financements, en mettant en relation les acteurs du territoire avec des investisseurs, et en offrant des ressources pour bâtir des stratégies solides de levée de fonds. Cette aide est essentielle pour concrétiser des idées en innovations tangibles sur le marché. En cela, Medicalps est un maillon essentiel du territoire de santé qu’est le Sud Rhône Alpes.
La vision de Medicalps ne se limite pas à la technologie : elle s’inscrit dans un projet sociétal. En travaillant sur des solutions de santé éco-responsables et accessibles, le cluster contribue à dessiner un avenir où chacun bénéficie des avancées technologiques. Avec plus de 10 000 emplois liés au secteur sur le territoire, l’impact économique et social de ces initiatives est évident. En croisant disciplines et compétences, Medicalps fait de Grenoble un modèle d’intégration entre recherche, industrie et société. Un modèle à suivre pour répondre aux grands défis de la santé de demain.
Agir à dom’ : pionnier de la santé accessible à domicile
Depuis sa création en 1974, Agir à dom’ s’impose comme un acteur majeur du soin à domicile en France. En alliant technologies de pointe et accompagnement humain poussé, l’organisation offre une prise en charge globale des patients, qu’il s’agisse de soins médicaux ou de soutien social. L’aventure d’Agir à dom dans les soins à domicile a commencé par une innovation majeure : la miniaturisation et la sécurisation des dispositifs médicaux. Au départ, les patients souffrant de pathologies respiratoires étaient contraints à des séjours prolongés à l’hôpital pour recevoir des traitements d’oxygénothérapie avec des appareils de la taille d’une table de chevet et des moteurs bruyants. Avec l’avènement de compresseurs d’air portables plus discrets et de dispositifs de ventilation adaptés, il est devenu possible de déployer ces soins directement au domicile des patients.
Cette rupture technologique a réduit la dépendance à l’hospitalisation tout en améliorant la qualité de vie des malades.
Aujourd’hui, Agir à dom’ prend en charge près de 40 000 patients à domicile par an. Cette prise en charge est assurée par plus de 500 collaborateurs, dont 40 % sont des professionnels paramédicaux. En collaborant étroitement avec des industriels, l’entreprise a su peu à peu optimiser ses solutions. Leurs efforts ont abouti au fil du temps à des dispositifs plus accessibles et ergonomiques, répondant aux besoins des patients tout en garantissant leur sécurité. Dernièrement, c’est sur le suivi personnalisé des patients qu’Agir à dom a fait le plus de progrès. Pour cela, elle a acquis récemment la société bretonne OpenHealth, spécialisée dans l’analyse de données de santé. « L’activité d’Agir à dom’ s’appuie de plus en plus sur la collecte et l’analyse de données pour anticiper les besoins des patients et adapter leur suivi », précise Philippe Roussel, directeur de l’organisation. Grâce à OpenHealth, le groupe est capable de surveiller les flux de données de santé en temps réel, offrant ainsi une meilleure réactivité face aux éventuelles complications.
Ce suivi connecté contribue également à optimiser l’observance des traitements. Par exemple, les dispositifs de ventilation et d’oxygénothérapie sont équipés de capteurs qui permettent de contrôler leur utilisation et d’intervenir rapidement si nécessaire. Cette méthode, unique en son genre, garantit une prise en charge de qualité tout en respectant les contraintes des patients.
Agir à dom’ n’est pas qu’un prestataire de santé : c’est aussi une organisation à mission, dont les actions s’inscrivent dans une logique d’inclusion sociale. L’intégration d’assistantes sociales dans l’équipe permet de répondre à des problématiques annexes mais cruciales, comme la mise aux normes électriques des habitations ou la prise en charge des factures d’énergie impayées. Sans ces prérequis, Agir à dom’ ne peut assurer que la prise en charge d’un patient sera optimale car elle ne peut garantir le bon fonctionnement des dispositifs médicaux.
Par ailleurs, l’organisation veille à ce que les patients les plus vulnérables puissent continuer leurs traitements, même en cas de difficultés financières. Un suivi attentif qui fait la satisfaction des personnes bénéficiant de ce service… et qui fait aussi sens pour le personnel d’Agir à dom’. « Les témoignages des patients sont une source de motivation majeure pour nos collaborateurs, car ils révèlent l’impact concret de notre travail », ajoute Philippe Roussel. En réconciliant innovation technologique et solidarité, Agir à dom’ redéfinit les standards du soin à domicile, tout en plaçant l’humain au centre de ses priorités.
Office Santé : réinventer les territoires par des espaces de santé durables
Fondée en 2014 par Stéphane Guivarc’h en Ille-et-Vilaine, Office Santé n’était pas prédestinée à poser – aussi – ses valises dans le Sud Rhône Alpes. Et pourtant… Plusieurs de ses maisons de santé ont vu le jour en Auvergne-Rhône-Alpes. En dix ans, Office Santé s’est en effet imposé comme un acteur majeur de l’aménagement des territoires de santé en France. Qu’il s’agisse de petites communes de 2 500 habitants ou de grandes métropoles, l’organisation adapte ses établissements, d’une taille de 300 à 600 m2, aux particularités locales. Avec un humain de taille : parvenir à instaurer une relation équilibrée avec les praticiens de santé mais aussi les responsables politiques. Pour cela, Office Santé privilégie « l’écoute et la collaboration ».
60 % des projets sont initiés par des élus. 30 % sont initiés par des opérateurs de santé (groupe clinique, d’imagerie médicale, pharmacie…). Enfin, 10 % relèvent de la démarche personnelle d’Office Santé quand il identifie un besoin spécifique dans une zone.
Un exemple concret de cette ambition est le projet en cours à Saint-Égrève, près de Grenoble. Ce futur espace de santé pluridisciplinaire vise à regrouper généralistes, spécialistes et paramédicaux pour répondre aux besoins croissants des habitants de la région. Pour donner vie à ce projet, la société gère tout, du foncier à l’exploitation. Plus largement, Office Santé cible avant tout les déserts médicaux. « Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ils ne se limitent pas aux zones rurales mais s’étendent également à certaines zones urbaines », souligne Stéphane Guivarc’h. D’où la présence de ses maisons de santé dans de grandes villes comme Lyon ou Toulouse.
La tâche d’Office Santé ne se limite pas à construire des bâtiments : son modèle, unique en son genre, intègre toute la chaîne de valeur. Trois briques modulables que sont le foncier, l’immobilier et l’exploitation des structures. Tout cela en prenant soin d’assurer l’intégration de la maison de santé dans tout un écosystème pour que le projet fasse sens. Cette approche holistique permet d’offrir des infrastructures fonctionnelles et durables, qui évoluent avec les besoins des populations. « L’immobilier n’est qu’un moyen pour nous : la finalité reste de garantir un accès durable aux soins pour tous. Nous sommes un aménageur de territoires de santé », souligne Stéphane Guivarc’h.
Office Santé va parfois encore plus loin, en assurant aussi l’exploitation des maisons de santé. C’est le cas avec le réseau Kersanté. Ce dernier suit aujourd’hui 28 000 patients, dont « environ 80 % étaient sans médecin traitant auparavant », pointe le fondateur. En outre, il existe très peu de cellules vacantes parmi les projets menés à bien par Office Santé, preuve d’une implantation utile et durable.
L’engagement d’Office Santé envers la durabilité se traduit également par une attention particulière à l’impact environnemental des projets. Avec sa démarche à 360°, Office Santé redéfinit les standards de l’aménagement des territoires de santé. Une mission essentielle pour répondre aux besoins d’aujourd’hui et de demain.
Clinatec : quand la recherche biomédicale révolutionne la santé
Clinatec est un centre de recherche biomédicale novateur situé à Grenoble. En partenariat avec le CEA, le CHU de Grenoble et l’université de Grenoble-Alpes, il incarne, depuis 2010, une approche multidisciplinaire pour traiter des pathologies complexes, notamment neurologiques. « Clinatec explore des solutions où l’énergie, les nanotechnologies et la santé se croisent pour relever des défis médicaux majeurs », explique Laurent Hérault, directeur scientifique du centre et directeur depuis 2023 du Fonds Clinatec. Cette structure philanthropique a pour mission de financer des réponses technologiques à des besoins patients identifiés par des médecins. Elle évalue les apports de la tech dans la médecine de demain.
« L’objectif est de développer des dispositifs médicaux révolutionnaires face aux déficiences des traitements actuels, en particulier dans le domaine du handicap moteur. La force de Clinatec réside dans la collaboration entre ingénieurs, médecins, neuroscientifiques, roboticiens et autres experts pour générer des innovations multidisciplinaires », précise Laurent Hérault. Parmi les réalisations phares de Clinatec, l’implant cérébral Wimagine est une avancée révolutionnaire. Il s’agit d’un stimulateur cérébral connecté à un exosquelette qui permet à des patients atteints de handicaps moteurs de retrouver une certaine autonomie. En 2019, une étude publiée dans The Lancet a démontré qu’un patient était capable de contrôler un exosquelette par la pensée grâce à cette technologie.
Mais Clinatec ne s’arrête pas là. Le centre travaille sur quatre axes principaux : l’amélioration de la qualité de vie des patients, la recherche sur les maladies neurodégénératives, le développement de nouveaux dispositifs médicaux et l’optimisation des traitements personnalisés. Chaque projet est conçu avec l’ambition d’offrir des solutions concrètes et accessibles aux patients.
L’implantation de Clinatec à Grenoble ne doit rien au hasard. Cette ville, réputée pour sa concentration exceptionnelle d’acteurs de la recherche et de l’industrie, est un terreau fertile pour l’innovation. « Notre spécificité géographique, contrainte par les massifs alentour, fait que toutes les expertises sont rassemblées dans un petit périmètre. La proximité est très importante car l’innovation naît plus facilement de la fertilisation croisée des différents domaines. Nous travaillons côte-à-côte, les échanges et la coopération sont assez naturels. On a du plaisir à travailler ensemble », souligne Laurent Hérault. Ce contexte favorise en effet une collaboration unique entre ingénieurs, neuroscientifiques, médecins, experts en IA et roboticiens. Avec ses équipes multidisciplinaires et son ambition d’intégrer les technologies dans le quotidien des patients, Clinatec redéfinit les contours de la recherche médicale. Des innovations qui ont vocation à être déployées partout dans le monde. Par exemple, la solution mise au point par Clinatec dans la lutte contre la maladie de Parkinson pourrait traiter quelque 300 000 patients éligibles dans le monde. « C’est une opération qui ne coûte pas cher, bien moins cher que la mise au point d’une solution médicamenteuse qui va nécessiter 2 à 3 milliards d’investissements. Et c’est une opération qui peut se pratiquer partout sur la planète. La prochaine étape est de mettre au point des approches non invasives, par l’entremise de bonnets souples notamment, qui rendront ces traitements encore plus simples et moins chers. Notre philosophie est de mettre le soin du patient au cœur de la recherche médicale. »
Une approche humaine très motivante qui alimente la passion des scientifiques dans leur quête de solutions médicales utiles pour toutes et tous. « Une nécessité quand on sait que les troubles neurologiques touchent 44 % de la population mondiale et que la plupart d’entre eux n’ont pas encore de solutions médicales », conclut Laurent Hérault.
Medevice : investir pour construire la santé de demain
Créé en 2011, Medevice est un fonds d’investissement unique en son genre, spécialisé dans les dispositifs médicaux. Il trouve ses racines à Grenoble par l’entremise d’une de ses cofondatrices, Cécile Real. « J’ai commencé ma carrière dans la région en 1997 où je travaillais pour une branche d’application santé d’un spécialiste du nucléaire, la Cogema. J’ai ensuite fondé une des premières start-up santé grenobloises, Bioprofile, spécialisée dans les implants orthopédiques. Après avoir revendu cette société en 2007, j’ai fait deux mandats à la tête de Medicalps où j’ai participé à la création de quelques start-up », explique-t-elle. De là, a germé l’idée d’un fonds d’investissement axé santé, avec une équipe ayant des compétences en la matière pour un accompagnement sur la durée. Medevice était né. Implanté à Grenoble, il s’appuie sur une histoire locale riche en innovations médicale pour accompagner les startups du secteur. « L’idée était d’apporter un soutien actif, pas seulement financier, à des entrepreneurs souvent confrontés à des défis complexes et à des systèmes réglementaires exigeants », explique la cofondatrice.
Financé à 90 % par des entrepreneurs et des family offices – le reste provient d’institutionnels, dont le Crédit Agricole –, Medevice a investi dans quinze sociétés réparties entre Grenoble, Paris et Bordeaux. À chaque fois des projets à fort potentiel d’innovation. « Nous intervenons tôt, dans les premières années de développement, pour poser les bases solides de leur réussite future », précise Cécile Real. Ce modèle repose sur une implication directe des membres du fonds dans les différents aspects du développement des start-up : stratégie, industrialisation, marketing ou encore ressources humaines. Autre particularité de Medevice : son approche collaborative. Les dirigeants des start-up accompagnées sont encouragés à partager leurs expériences et leurs ressources. « Nous avons développé un réseau où nos sociétés s’entraident, qu’il s’agisse de mutualiser une chaîne d’assemblage ou de partager un spécialiste pour entrer sur le marché allemand », ajoute-t-elle. Medevice mise également sur un écosystème local dynamique.
Depuis sa création il y a près de quinze ans, Medevice a su s’adapter aux évolutions du secteur. Si les premiers investissements ont porté sur la santé numérique et la télémédecine, les projets récents incluent davantage de solutions en intelligence artificielle pour l’imagerie médicale ou des dispositifs d’analyse en temps réel pour la chirurgie interventionnelle. Parmi ces innovations, un dispositif basé sur l’IA permet de distinguer en temps réel les tissus sains des tissus tumoraux en cours d’opération. Plus besoin d’envoyer des prélèvements au laboratoire de l’hôpital et d’attendre à chaque fois une demi-heure pour savoir si la marge prise autour de l’ablation d’une tumeur est saine ou non. Cette technologie offre une précision accrue, réduisant ainsi les risques de récidive et améliorant les chances de rétablissement des patients.
Le fonds Medevice s’inscrit dans une vision à long terme : aider les start-up à atteindre leur maturité avant de passer le relais à des acteurs plus grands, capables de les déployer à l’échelle internationale. Avec sa philosophie d’investissement active et son ancrage fort dans l’écosystème grenoblois, Medevice illustre comment un fonds peut être un catalyseur pour les innovations de santé de demain.
Instance politique du Crédit Agricole, la Fédération nationale du Crédit Agricole est une association loi 1901. Ses adhérents sont les Caisses régionales, représentées par leurs présidents et leurs directeurs généraux.
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