La 59e édition du Salon international de l’Agriculture vient de fermer ses portes. De nombreux évènements ont rythmé la semaine, à l’instar du renforcement du partenariat entre France Carbon Agri et le groupe Crédit Agricole. Véritable défi pour la filière agricole, le carbone est au cœur de tous les échanges. En témoigne, la journée de l’agriculture et de l’agroalimentaire organisée par la FNCA et Crédit Agricole SA début février.
Septembre 2002, Johannesburg, Afrique du Sud, Jacques Chirac est alors président de la République et participe au quatrième sommet de la terre de l’Organisation des Nations unies. Face aux différents chefs d’Etat, il ouvre son discours par ce cri d’alarme : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Une scène restée dans les mémoires.
Vingt ans plus tard, c’est par ces mêmes mots que Dominique Lefebvre, président de la Fédération nationale du Crédit Agricole et de Crédit Agricole SA (Casa), introduit la journée agri-agro. Après une année 2022 marquée par des incidents climatiques inquiétants – épisodes de gel et de grêle, records de températures, pénuries d’eau, etc. –, Dominique Lefebvre insiste sur « l’importance de la reconnaissance de notre vulnérabilité face au dérèglement climatique ». Devant un public composé des principaux acteurs de l’écosystème agricole du groupe, il rappelle le rôle déterminant que joue la banque verte dans la transition agricole et, en particulier, dans la question du carbone. Selon lui, « l’enjeu et l’urgence sont tels qu’il faut tout réinventer. » Et, pour y parvenir, le Crédit Agricole doit « nouer un dialogue avec l’ensemble des parties prenantes » ; il y a une véritable intermédiation à conduire entre les agriculteurs et le secteur financier afin de faire correspondre les ressources et les besoins : « Un défi passionnant qui ouvre de nouvelles perspectives. »
Aujourd’hui, l’agriculture représente 22 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES[1]) », rappelle Jean-Marc Jancovici, président fondateur de The Shift Project. Avec près de deux tiers du territoire français consacrés à la production agricole, l’agriculture et l’agroalimentaire sont des filières pivots de la transition écologique. Et pour la réussir, cela nécessite de mobiliser tous les acteurs de la chaîne agricole – chambres d’agriculture, coopératives agricoles, acteurs bancaires, etc. – afin de transformer les modèles de production actuels par de nouvelles pratiques : agriculture biologique, agroécologie, agroforesterie, mise en œuvre de méthodes « bas-carbone », écoconception de produits alimentaires, etc. Exemple en Mayenne ou Christophe Bouvet, éleveur bovin a signé, en 2020, une convention de partenariat, d’une durée de cinq ans, avec l’association Solénat et l’entreprise régionale mbpack, spécialiste des emballages alimentaires, afin de compenser les émissions de carbone émis par la société. « En m’alignant sur le cahier des charges du label Carbocage, visant à optimiser les propriétés écologiques des haies, je m’engage à maintenir et à entretenir mes 13 kilomètres de haies en contrepartie d’une compensation financière », explique l’agriculteur. Dans le Grand-Est, Maximin Charpentier, président de la chambre d’agriculture régionale, a, quant à lui, présenté le développement d’un carburant issu de la biomasse et sa distribution au niveau local.
[1] Selon le dernier rapport du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec)
Première banque de l’agriculture et de l’agroalimentaire en France, le Crédit Agricole fait de la transition l’un de ses défis majeurs. Fin 2021, il a dévoilé son projet sociétal axé autour de trois thématiques clés – le climat et la transition vers une économie bas carbone, la cohésion sociale et l’inclusion, et la transition agricole et agroalimentaire. Grégory Erphelin, directeur général de la Fédération nationale du Crédit Agricole, a rappelé que cette transition se ferait « en nous appuyant sur nos expertises et nos écosystèmes locaux. (…) Il n’y a pas qu’une seule solution, il faut s’enrichir des nombreuses initiatives qui voient le jour en région. » Comme en Loire Haute-Loire ou les équipes de Gaëlle Regnard, directrice générale de la Caisse régionale ont mené une enquête auprès de 1 000 agriculteurs, installés depuis moins de dix ans. L’idée ? recueillir leur perception des enjeux liés à la transition agricole. 80 % d’entre eux pensent qu’ils doivent répondre rapidement à ces défis, notamment celui du manque d’eau, et de la transmission aux nouvelles générations. Pour la directrice générale, cette étude représente une formidable base de discussion pour comprendre les besoins des agriculteurs. Elle en déduit une évolution des métiers de la Caisse régionale, notamment sur le recrutement d’ingénieurs pour mieux accompagner les clients dans la transition énergétique. En Bretagne, région où l’agroalimentaire reste l’une des principales industries, la Caisse régionale des Côtes d’Armor, représentée par son président Olivier Desportes, s’appuie sur son expertise d’entreprise en matière de responsabilité sociétale afin de diffuser avec pédagogie, auprès de ses clients, les changements à opérer.
Pour réussir ces transitions, Eric Vial, président du Crédit Agricole des Savoie, et président sponsors du chantier sur la décarbonation explique également que le Groupe doit également apporter des réponses personnalisées en fonction des filières agricoles et de la spécificité de chaque territoire en s’appuyant par exemple sur ses administrateurs de Caisses locales.
Pour réussir cette transition vers un système agro-alimentaire compétitif et durable, Anne-Caroline Pace-Tuffery, directrice générale d’IDIA Capital Investissement, a annoncé la création d’un fonds d’investissement dédié. Il vise à répondre aux besoins de financement en capital de l’ensemble des entreprises de la chaine de valeur agroalimentaire, en France et en Italie qui s’inscrivent dans des stratégies de transitions ambitieuses.
Du côté d’Amundi, représenté par Dominique Carrel-Billiard, directeur des actifs réels, et Romain Sautrau, directeur investissement de Supernova Invest, fonds d’investissement pour start-up à fort potentiel, indiquent que d’autres outils financiers pourraient être imaginés et mobilisés afin d’accompagner les entreprises agricoles et agroalimentaires dans le cadre des transitions.
Enfin, sur le marché des crédits carbone, Samuel Vandaele, président de la SAS France Carbon Agri, insiste sur la nécessité de l’encadrer en labellisant, en autres, les réductions d’émissions de GES. Ces propos font écho à ceux de Jean-Christophe Roubin, directeur de l’agriculture et de l’agroalimentaire chez Crédit Agricole S.A pour qui la banque mutualiste doit devenir un « Tiers de Confiance » afin d’accompagner la structuration du marché du carbone.
Claude Vivenot, président de la Caisse régionale de Lorraine et du comité agri-agro du Crédit Agricole, et Pascal Delheure, directeur général de la Caisse régionale de Normandie et rapporteur du comité agri-agro du Crédit Agricole, ont conclu cette journée en rappelant que de par ses racines agricoles, le Groupe a toute légitimité à apporter des réponses aux enjeux de l’agriculture de demain, à conduire cette transition et à l’accompagner, comme il le fait depuis plus de cent ans.
Instance politique du Crédit Agricole, la Fédération nationale du Crédit Agricole est une association loi 1901. Ses adhérents sont les Caisses régionales, représentées par leurs présidents et leurs directeurs généraux.
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